6 mai 2009 3 06 /05 /mai /2009 04:09
Par Chris Marsden   

 

wsws  

5 mai 2009 



Ce qui est particulièrement révélateur dans les perspectives économiques mondiales publiées la semaine dernière par le Fonds monétaire international (FMI) c’est son évaluation de la situation de précarité des économies européennes.

Le FMI a décrit les Etats-Unis comme se trouvant au centre de la crise économique mondiale mais a également prédit une aggravation de la récession en Europe. Il évalue que l’économie de la zone euro se contractera de 4,2 pour cent cette année, une prévision considérablement pire que sa prédiction de janvier qui était de 2 pour cent.

Les Etats de l’Union européenne (UE) sont criblés de dettes massives dues à des renflouements et des plans de sauvetage correspondant à des garanties financières se chiffrant à 2,3 mille milliards d’euros, 300 milliards d’euros en programmes de récapitulation et 400 milliards d’euros supplémentaires comprenant divers programmes de sauvetage et de restructuration.

Le service statistique de la Commission européenne, Eurostat, a relevé que l’Europe était plongée dans une profonde récession économique avec une chute de 34,5 pour cent des entrées de commandes industrielles par an. Le déficit extérieur (de la balance commerciale) de la zone euro a atteint 57,3 milliards d’euros au dernier trimestre de 2008, près de trois fois le montant de celui de la même période de 2007. Ce ne sont pas seulement les exportations qui déclinent en raison de la récession mondiale. Les investissements directs opérés par l’UE à l’étranger s’étaient élevés à tout juste 23,9 milliards d’euros durant les trois derniers mois de 2008 contre 171,9 milliards d’euros au quatrième trimestre de 2007. Les investisseurs étrangers ont également désinvesti dans l’UE.

Les coûts de renflouement et la baisse des recettes fiscales dus à la récession ont occasionné une montée en spirale des déficits gouvernementaux qui sont passés à 2,3 pour cent du PIB pour les 27 nations communautaires combinées. Dans la zone euro, la dette publique s’est élevée à 69,3 pour cent du PIB contre 66 pour cent fin 2007 et à 61,5 pour cent contre 58,7 pour cent dans l’Union européenne.

On s'attend à ce que le PIB européen chute de 1,2 pour cent et, selon un rapport du comité consultatif économique européen (European Economic Advisory Group), que l’économie se contracte de 2 pour cent.

Le taux chômage devrait augmenter en moyenne de huit pour cent.

Le FMI a dit que la zone euro serait confrontée à une récession pire que celle que connaissent les Etats-Unis, en se plaignant de ce que la Banque centrale européenne était trop lente à réagir à l’imminente récession et que la politique financière de l’Europe n’était pas appliquée de façon « suffisamment complète et coordonnée ».

Il y a une inquiétude particulière sur l’état du système bancaire européen. Alors que les banques américaines ont provisionné environ la moitié de leurs pertes, les banques européennes n’en ont couvert jusqu’à maintenant qu’un cinquième. Dans un avertissement sombre, le FMI a remarqué que les pertes totales élimineraient l’ensemble des actifs bancaires mondiaux.

Le Financial Times rapporte que le cabinet de recherche Independent Credit View (I-CV) suisse, sis en Suisse, a averti d’une « deuxième vague » de stress relié aux dettes déferlant sur l’Europe dans des conditions où les banques disposent de bien moins de coussins en termes de réserves que les banques américaines.

Peter Jeggli, le fondateur d’I-CV, a déclaré, « Le plus grand risque se trouve en Europe… Les Américains ont dépassé la courbe. Les banques européennes sont exposées aux transactions immobilières américaines et aux problèmes existant en Europe de l’Est et en Espagne où la situation prend un tournant dramatique. Nous pensons que les caisses d’épargne espagnoles sont pratiquement en faillite et nécessiteront un renflouement de l’Etat. »

Le Financial Times précise que « les banques européennes sont exposées à une série de bulles à tête d’hydre. Elles ne sont pas seulement confrontées aux lourdes pertes occasionnées par l’immobilier américain mais aussi à l’effondrement du boum du crédit dans leur propre arrière-cour et aux retombées des hauts niveaux de la dette des grandes entreprises dans la zone euro. Il faut plus de temps aux dégâts pour remonter à la surface du fait des prêts bancaires traditionnels en Europe qui apparaissent plus tard dans le cycle au fur et à mesure que les défauts de paiement augmentent. La férocité de la récession en Europe ne laisse aucun doute que les pertes seront énormes cette fois. »

Le système bancaire est particulièrement exposé en raison de l’effondrement des économies en Europe de l’Est.

Plusieurs pays se sont déjà présentés humblement au FMI, dont la Hongrie, la Serbie, la Roumanie, la Lettonie et l’Ukraine. De plus, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) et la Banque européenne d’Investissement (BEI), ont octroyé des aides à hauteurs de 24,5 milliards d’euros aux banques d’Europe de l’Est.

Et pourtant, la possibilité de l’écroulement d’une ou de plusieurs économies d’Europe de l’Est subsiste ce qui aurait un effet domino qui pourrait entraîner l’effondrement d’Etats voisins et de banques en Europe de l’Ouest.

Selon des chiffres rassemblés par le quotidien néerlandais Handelsblad, la dette nationale de l’Italie dépasse déjà de loin son PIB, la Grèce se rapproche de ce chiffre et la Belgique, la France, l’Allemagne, le Portugal et l’Autriche arrivent tous à 60 pour cent du PIB.

Allemagne

De nombreux rapports identifient l’Allemagne comme étant particulièrement vulnérable à la récession mondiale en raison de sa dépendance aux exportations qui comptent pour 40 pour cent de son PIB et de son exposition à la dette d’Europe de l’Est.

Le FMI a prédit que l’économie allemande se contracterait de 5,6 pour cent cette année tandis qu’un groupe d’institutions financières allemandes a prédit une baisse de 6 pour cent.

L’Allemagne risque d’être confrontée à une récession « particulièrement persistante » en étant affectée par un déclin de 23 pour cent de ses exportations cette année ce qui ferait passer le taux de chômage à près de 11 pour cent. Le déficit budgétaire allemand gonflera pour atteindre 132,5 milliards d’euros ou 5,5 pour cent du PIB en 2010, par rapport à 3,7 pour cent cette année, précisent les instituts allemands.

L’Allemagne a totalisé l’année dernière près d’un quart des dépréciations bancaires européennes. Ses investissements en Europe de l’Est (450 milliards de dollars ou quatre pour cent des actifs bancaires allemands) posent un risque supplémentaire. Et ce pas seulement en Allemagne.

L’Allemagne demeure le moteur de l’économie européenne. Une récession qui ne cesse d’empirer dans ce pays entraînera le reste du continent dans son sillage.

Grande-Bretagne

L’état de désolation avancée de l’économie britannique est la deuxième cause majeure d’inquiétude en raison principalement du rôle joué par Londres en tant que centre financier.

Le FMI a prédit que le PIB de la Grande-Bretagne se contractera de 4,1 pour cent cette année, bien plus que ne l’avait admis le gouvernement du premier ministre Gordon Brown et que la Grande-Bretagne subirait une récession continue.

Dans le budget de la semaine passée, le chancelier Alistair Darling a prédit un déclin de 3,5 pour cent cette année et un retour à la croissance d’ici 2010.

En commentant le décalage, le directeur du FMI, Dominique Strauss-Kahn a dit, « La reprise dépend partiellement de celle de la confiance, il est absolument normal que les gouvernements du monde entier tenteront de reconstruire la confiance afin de voir la partie supérieure plutôt que la partie inférieure. »

« Je comprends que beaucoup de gouvernements ont des prévisions qui sont meilleures que les nôtres. Il s’était révélé que l’année dernière nous avions eu raison », a-t-il ajouté.

Le 25 avril, le Wall Street Journal était profondément sceptique quant aux perspectives britanniques en remarquant que « Le Royaume-Uni, avec sa capitale qui opère comme le premier centre d’activité financière mondial, où un emploi sur cinq dépend des services financiers et plus du quart de ses recettes fiscales… la chute du produit intérieur brut du premier trimestre — [1,9 pour cent] la plus forte depuis la baisse de 2,4 pour cent enregistrée au troisième trimestre de 1979, signifie un défi pour le gouvernement britannique qui accumule les dettes à un taux jamais vu depuis la Deuxième Guerre mondiale, au fur et à mesure qu’il dépense de l’argent pour édulcorer la récession et sauver son système bancaire. Au cours de ces trois prochaines années, les emprunts nets du gouvernement pour déficit budgétaire s’élèveront à 488 milliards de livres sterling (718 milliards de dollars). »

Le FMI prédit que la dette gouvernementale britannique atteindra plus de 80 pour cent du PIB.

Une idée de l’étendue de la récession est donnée par la hausse du chômage à plus de deux millions et des prédictions qu’il passera à trois millions d’ici 2010. De plus, la dernière étude mensuelle des affaires de la Chambre de commerce britannique a trouvé que 70 pour cent des entreprises projettent de geler ou de réduire les salaires cette année et la moitié envisage de licencier du personnel durant les six prochains mois.

Le FMI a averti que le marché immobilier britannique devrait poursuivre sa baisse. Le prix des maisons ayant chuté de 20 pour cent, le FMI a déclaré que tout comme en Espagne et en Irlande, il restait « encore un long chemin à parcourir. »

David Cameron, le dirigeant de l’opposition conservatrice dont on s’attend à ce qu’il gagne les élections législative de l’année prochaine, a dit vouloir créer une nouvelle « période d’austérité » en promettant des coupes encore plus sombres que celles promises par le gouvernement travailliste.

Espagne

L’Espagne figure parmi les nations d’Europe occidentale les plus durement affectées par la récession.

Le FMI a prédit une récession continue de l’économie espagnole suite à l’effondrement de son marché immobilier. Il s’attend à ce que l’économie rétrécisse de 3 pour cent en 2009 contrairement aux prédictions du gouvernement qui sont de 1,6 pour cent. Ce mois-ci, le chômage a atteint quatre millions de chômeurs en ayant doublé au cours de l’année passée. A présent il touche 17,4 pour cent de la population et l’on s’attend à ce qu’il atteigne 20 pour cent sous peu.

Le gouvernement socialiste de Jose Luis Rodriguez Zapatero a riposté avec un plan de sauvetage fiscal de 70 milliards d’euros et a promis d’autres versements. Mais le FMI a émis un sérieux avertissement en ce qu’une aggravation du déficit budgétaire censé passer à 8 pour cent du PIB soulèvera le danger d’un effondrement économique.

France

En France, le gouvernement Sarkozy a estimé que l’économie se contractera de 2,5 pour cent cette année. Le premier ministre François Fillon a dit que 2009 sera « une année de récession forte » pour la France.

Cette évaluation a été contredite par l’OCDE qui prédit une contraction de 3,3 pour cent. Le déficit budgétaire de la France est de six pour cent.

Le mois dernier, le chômage a enregistré une hausse de 60 000 à 70 000 chômeurs après une perte de 79 000 emplois en février. Le taux de chômage est actuellement de 8,2 pour cent mais on s’attend à ce qu’il atteigne 10 pour cent d’ici la fin de l’année. Le chômage affiche déjà un pourcentage massif de 21,2 parmi les jeunes de moins de 25 ans et est progression en France.

(Article original paru le 28 avril 2009)http://www.wsws.org/francais/News/2009/mai2009/rece-m05.shtml

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