24 janvier 2010 7 24 /01 /janvier /2010 22:56

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Apprentis sorciers

(14 janvier 2010)


Par Agnès Rousseaux (Basta)


Après les OGM, les nanotechnologies s’invitent dans notre assiette : les nano-aliments, traités avec des nano-pesticides et contenus dans des nano-emballages, se multiplient. A la clé : de faramineux profits financiers pour les industriels et des risques environnementaux et sanitaires aujourd’hui impossibles à évaluer. Le tout dans une totale - et incroyable - absence de règles et de contrôles.




Des aliments intelligents qui s’adaptent aux goûts du consommateur, des vêtements qui repoussent l’eau, des matériaux qui s’auto-réparent, de la « poussière intelligente » qui enregistre discrètement les conversations... Bienvenue dans le nano-monde ! Un univers où la science bricole des particules invisibles au microscope et empile des atomes à l’échelle du nanomètre, c’est-à-dire un milliardième de mètre [1]. Les nanotechnologies seront à la base d’une troisième révolution industrielle au cours du 21e siècle, nous promet-on.


Une révolution qui passe aussi par nos assiettes. Car ces nanoparticules sont déjà présentes dans les aliments industriels, les pesticides agricoles, les emballages alimentaires, les récipients de stockage... sans contrôle ni étiquetage. Des particules qui, du fait de leur minuscule taille, traversent les barrières biologiques et peuvent circuler dans tout l’organisme : la peau, les tissus, le cerveau... Alors, prêts pour une nourriture « atomiquement modifiée », aux effets encore inconnus ?


Au moins 106 nano-aliments déjà commercialisés


Difficile de recenser les nano-aliments existants. Les fabricants ont bien compris que les incertitudes qui entourent aujourd’hui les nano-particules peuvent effrayer les consommateurs. Ils ne communiquent pas clairement sur leur utilisation. Selon l’ONG les Amis de la Terre, c’est toute la chaîne alimentaire qui est aujourd’hui « contaminée ». Son rapport intitulé « Du Laboratoire à nos assiettes : les nanotechnologies dans l’alimentation et l’agriculture  » dresse la liste de 106 produits alimentaires, du jus de fruit « fortifié » aux compléments alimentaires vitaminés en passant par un « nano-thé ».


L’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (Afsset) dénombre tous secteurs confondus 2 000 nanoparticules manufacturées déjà commercialisées, et plus de 600 produits de consommation concernés. Si ces chiffres sont difficilement vérifiables du fait de l’absence de traçabilité, des estimations situent le marché des nano-aliments à plus de 5 milliards de dollars en 2005, avec des prévisions de 20 milliards de dollars pour 2010. Le groupe de consultants Helmut Kaiser prévoit que le recours aux nanotechnologies concernera, d’ici 2015, 40% des aliments industriels.


« Une technologie de confort pour les pays riches »


Du silicate d’aluminium pour empêcher l’agglutination des aliments en poudre, du ketchup épaissi avec du dioxyde de silicium, des vinaigrettes blanchies au dioxyde de titane... Les nano-aliments nous apporteraient, selon leurs partisans, des avancées culinaires majeures : du chocolat ou des glaces sans lipides et sans sucre, qui conservent le même goût que l’original, une huile (Shemen Industries) qui inhibe l’entrée du cholestérol dans le sang, un substitut alimentaire (Nanotrim de Nanonutra) qui brûle les graisses. Ou la possibilité de modifier le goût d’un aliment selon nos désirs. Des industriels comme Nestlé cherchent à concevoir les « nano-aliments du futur ».


Le géant agroalimentaire Kraft Foods (Etats-Unis) fait partie de ces pionniers. En 2000, il a financé un consortium de 15 universités et laboratoires de recherche, Nanotek, pour concevoir de la nourriture « intelligente » et personnalisée, tels des aliments qui contiennent des centaines de nano-capsules, remplies de saveurs, de nutriments, de couleurs différentes. Un four à micro-ondes pourrait déclencher, selon la fréquence des ondes, telle ou telle capsule, selon les désirs du consommateur. Une nourriture interactive en quelque sorte, qui peut même se transformer elle-même si une personne est allergique à un composant, ou libérer une dose de supplément nutritif si elle détecte des carences. Kraft Foods, le concepteur de ce projet, est propriétaire des marques de chocolat Milka, Côte d’Or, Toblerone, Suchard, et de café Carte Noir, Grand’Mère, Jacques Vabre ou Maxell. Imaginez demain votre café de couleur rose et au goût banane qui vous délivre votre dose quotidienne de vitamines C... Ou du chocolat qui libère des arômes de carotte tout en soignant votre gueule de bois. Formidable, non ?


Des nanos au goût d’OGM


Pourquoi ce déploiement de technologies ? « Sur le plan alimentaire, on ne comprend pas à quoi ça sert, explique Rose Frayssinet, de l’ONG Les amis de la Terre. « C’est comme les usages dans le textile : à quoi servent des chaussettes « sans odeur » avec du nano-argent ? Les nano-particules vont partir dans l’eau au bout de quatre lavages, et vont aller bouffer les microbes jusque dans les stations d’épuration. Au vu de ce que ça coûte, quelle est l’utilité sociale de tout ça ? Ce sont des technologies pour le confort des plus riches ».



Certains voient les nano-aliments comme une « aubaine » pour les paysans du Sud. Leur credo ? Des nanos qui augmenteraient la productivité agricole et permettraient de lutter contre la faim. Une promesse qui rappelle celles des lobbys biotechnologiques et leurs OGM. La comparaison ne s’arrête pas là : risques sanitaires et environnementaux, privatisation du vivant ou de combinaisons d’atomes par des brevets industriels, mise sur le marché de produits dont l’innocuité n’est pas prouvée... Des nanocides (pesticides utilisant les nano-technologies) intelligents qui nécessiteraient un dosage moins important que les pesticides actuels, et ne causeraient aucun mal aux insectes ? Le fait que ce soit des firmes comme Monsanto, Bayer ou Syngenta qui les développent ne peut qu’inviter à rester très prudent sur le sujet...


Vers un nouveau scandale sanitaire ?


« Dans le cas des OGM, nous avons obligé Monsanto à rendre publiques des études partielles de toxicité dissimulées au public. Des études semblables n’existent pas sur la nocivité des nanoparticules, souligne la Fondation Sciences citoyennes. Et les lanceurs d’alerte sont actuellement dissuadés par tous les moyens (poursuites en justice...) de briser la propagande officielle ». Pour Rose Frayssinet, nous sommes face à un risque encore plus grand que les OGM. « Les OGM, c’est un secteur, alors que les nanotechnologies concernent tous les secteurs. Les risques sont d’autant plus difficiles à analyser. On ne peut pas avoir une vision globale des implications ».


 

Difficile en effet de contrôler le comportement de nano-particules. Elles ne répondent pas aux lois de la physique classique, mais à celles de la mécanique quantique. Construire des particules, atome par atome, manipuler la matière au niveau des molécules, c’est entrer dans un monde d’incertitude radicale. Les propriétés des particules, comme leur toxicité ou leur persistance biologique, varient selon leur taille. De fait, les connaissances actuelles sur les effets toxiques des nano-particules manufacturées sont très limitées.


« Les données disponibles indiquent que certaines nanoparticules insolubles peuvent franchir les différentes barrières de protection, se distribuer dans le corps et s’accumuler dans plusieurs organes, essentiellement à partir d’une exposition respiratoire ou digestive », prévient une étude de l’Afsset, en 2006. Les nano-particules se diffusent dans les alvéoles pulmonaires, le sang, la barrière hémato-encéphalique qui protège le cerveau, ou le placenta. Fin 2008, un nouveau rapport de l’Agence juge que la nano-toxicologie fournit « des résultats encore peu nombreux, disparates et parfois contradictoires » et qu’il « n’est cependant pas possible d’exclure à cette date l’existence d’effets néfastes pour l’homme et l’environnement ». Quant à l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), après avoir rappelé que des études extérieures montrent de possibles altérations de l’ADN par les nano-particules [2], elle confesse « l’impossibilité d’évaluer l’exposition du consommateur et les risques sanitaires liés à l’ingestion de nanoparticules. » Très rassurant...


Nano-particules : l’amiante du 21ème siècle ?


Une étude britannique démontre l’existence d’un effet indirect des nanoparticules qui endommageraient « à distance » l’ADN [3]. Marie-Claude Jaurand, directeur de recherche à l’INSERM, pointe du doigt les nano-tubes de carbone, matériau ultra-résistant utilisé dans l’industrie, pour leurs effets « similaires à ceux de l’amiante », concernant la production de lésions de l’ADN et la formation d’aberrations chromosomiques. Face à ces risques, que font les instances compétentes ? Pas grand chose. Les instruments règlementaires sont inadaptés. Ministères et agences sanitaires sont complètement dépassés (les documents les plus récents publiés sur le site du ministère de la Santé datent de 2007). L’évaluation des risques doit être totalement repensée.


Les systèmes d’autorisation de mise sur le marché reposent sur la composition chimique des produits. Pour les nanoparticules, cela ne suffit pas, car les effets dépendent aussi de l’organisation spatiale des éléments atomiques et de leur taille. Un élément non toxique peut le devenir à l’échelon nanométrique. « Le dioxyde de titane et les dioxydes d’argent n’ont pas les mêmes propriétés au niveau nanométrique et au niveau macroscopique, explique Rose Frayssinet. Ils n’ont pas les mêmes propriétés selon qu’ils mesurent 20 nano ou 60 nano. Pour étudier les risques, il faudrait donc mener des études pour toutes les échelles ». Mais cela coûte cher. Et les outils manquent. « D’après les textes européens, dès qu’on modifie un aliment, une étude d’innocuité est obligatoire. Mais personne ne sait le faire. Il y a encore un an, il n’y avait aucun filtre vraiment sûr pour récupérer les nano-particules. Sans compter que les délais d’études étant très longs, les résultats arriveront après la mise sur le marché. On demande aux fabricants de travailler dans des salles blanches, avec des scaphandres. Et juste derrière, on met les produits sur le marché. C’est aberrant ! ».


Concernant la production et la mise sur le marché, les industriels se réfèrent à la directive européenne REACH. Celle-ci est pourtant insuffisante. Seules les substances chimiques produites en quantité supérieure à une tonne par an y sont soumises. Vu la taille des nano-particules, cette quantité de production n’est pas toujours atteinte. Et pour le moment, aucune obligation d’étiquetage n’existe, même si le Parlement européen commence à se saisir de cette question.


L’État finance sans s’inquiéter des conséquences


« No data no market » (pas de données, pas de marché). Telle est la position défendue par de nombreuses associations écologistes, qui espèrent être rejointes par les syndicats de salariés. Elles demandent un moratoire sur les nano-produits. Et des procédures d’évaluation des risques adaptées. Les ONG souhaitent aussi débattre de l’utilité sociale des nanotechnologies, en particulier dans le secteur alimentaire.


Le gouvernement français a lancé en 2009 le plan Nano-Innov, qui vise à placer la France parmi les pays les plus en pointe sur les nanosciences, en encourageant la recherche fondamentale à travailler « avec les entreprises pour mettre au point des technologies, déposer des brevets, créer des produits  ». 70 millions d’euros ont été consacrés l’an dernier à ce projet. En parallèle, aucun fonds n’est dédié aux études toxicologiques et aux impacts sanitaires et environnementaux.


Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, a souligné à l’occasion du lancement de ce plan l’excellence de la recherche nationale sur les nanotechnologies (5ème rang mondial [4]) mais se désole que seulement 290 brevets aient été déposés en 2005, ce qui représente moins de 2% des brevets mondiaux. Car le secteur peut rapporter gros. La National Science Foundation (NSF) américaine évalue le marché des nanotechnologies à mille milliards de dollars en 2015. Selon la Fondation Sciences citoyennes, les investissements en recherche et développement ont été quasiment multipliés par dix entre 1997 et 2003 (3,5 milliards d’euros), avec une prévision de croissance de 40 % par an. « Les chercheurs nous disent souvent : il suffit qu’on parle de ’nanotechnologies’ dans nos projets pour avoir de l’argent pour mener des recherches », commente Rose Frayssinet.


Les multinationales de la pharmacie et de l’agrochimie sont sur les rangs pour fabriquer davantage de nano-aliments. A l’opposé de systèmes alimentaires organisés localement et écologiquement soutenables, se prépare une nouvelle révolution alimentaire, basée sur l’accaparement par quelques firmes privées des éléments constitutifs de la matière et de notre alimentation. Après la malbouffe, nous voici transformés en cobayes de la nano-bouffe, avec le silence complice de l’État.



Publicité de la chaîne de supermarché PriceChopper pour les nanotechnologies sur des boîtes de céréales

Publicité pour le revêtement antibactérien « Silver Nano » à l’intérieur des réfrigérateurs SAMSUNG

Notes

[1] Taille de l’atome : 1 dixième de nanomètre, ADN : 10 nanomètres, protéines : 20 nanomètres.

[2] « Certaines nanoparticules peuvent traverser et/ou altérer les membranes plasmiques, nucléaires et mitochondriales, induire une peroxydation lipidique et la génération d’espèces réactives de l’oxygène elle-même à l’origine d’un stress oxydatif pouvant altérer des protéines et l’ADN ( Hong 200657 ; Xia 200658 ; Beck-Speier 200559 ; Lewinski et al. 200860 ; Stone 200761 ; Hussain et al., 200562) ». Source : Nanotechnologies et nanoparticules dans l’alimentation humaine et animale - AFSSA

[3] « Nanoparticles can cause DNA damage across a cellular barrier » Gevdeep Bhabra et al., Nature Nanotechnology (en ligne le 5 novembre 2009)

[4] avec 3 526 publications en 2006, soit 5,6% des publications mondiales


En savoir plus

Preuves expérimentales de la toxicité de certains nano-matériaux (Etude des Amis de la Terre) :

Inventaire des produits alimentaires utilisant des nanotechnologies :

- Le rapport des Amis de la Terre (en anglais), Du Laboratoire à nos assiettes : les nanotechnologies dans l’alimentation et l’agriculture / La traduction partielle du rapport en français est disponible sur cette page.

- Nanotechproject (base de données en anglais)

- Base de données des acteurs des nanomatériaux en France (dont secteur alimentaire), mis en place par le CNRS et le Commissariat à l’énergie atomique mais pas actualisé depuis 2005...

Origine: http://www.bastamag.net


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1 janvier 2010 5 01 /01 /janvier /2010 02:02

Internationalnews

 

http://img532.imageshack.us/img532/9356/anos.jpg

 

Film autour de l'essor des nanotechnologies, et de leurs dangers.

Par exemple le dioxyde de titane réfléchit très bien la lumière et se trouve déjà dans nombre de crèmes solaires (Garnier, Loréal). Cette molécule non naturelle, à la taille nano, passe à travers tout le corps, peut percer la barrière lymphatique, se loger dans n'importe quel endroit du corps du fait de sa taille infime et amener un dysfonctionnement des parties concernées.

Vidéo ajoutée le : 18-11-2009


http://www.internationalnews.fr/article-le-silence-des-nanos-42169285.html

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9 novembre 2009 1 09 /11 /novembre /2009 02:23
LE MONDE
09.11.09


Source: www.techwall.org

es nanoparticules peuvent endommager les cellules humaines, notamment leur ADN, même à l'abri d'une barrière cellulaire. La démonstration de leur génotoxicité in vitro est rapportée par Gevdeep Bhabra (Southmead Hospital, Bristol) et ses collègues dans un article publié en ligne, jeudi 5 novembre, par la revue Nature Nanotechnology. Un effet indirect à double tranchant : un risque toxique inédit, mais de possibles actions thérapeutiques nouvelles.

Les nanoparticules ont une taille de l'ordre du nanomètre (nm), soit un milliardième de mètre (10-9 m). En médecine, elles servent dans les prothèses et au transport de médicaments, en particulier pour atteindre les organes protégés par une barrière cellulaire, comme le cerveau. Pour agir, elles doivent avoir une taille suffisante pour ne pas être trop vite éliminées par les reins. Celles utilisées en médecine ont donc une taille de 20 à 200 nm. Cela implique un accroissement de l'exposition de différents organes.

Les nanoparticules en alliage cobalt-chrome, présentes dans des prothèses en métal, ont une toxicité directe lorsqu'elles sont en concentration suffisamment importante au contact d'un organe : lésions de l'ADN, aberrations chromosomiques, mort cellulaire. Elles sont libérées du fait de l'usure des prothèses.


Barrière cellulaire


Gevdeep Bhabra et ses collègues ont placé pendant 24 heures l'alliage cobalt-chrome sur plusieurs couches de cellules classiquement utilisées comme modèle de barrière cellulaire, les séparant ainsi de cellules humaines, des fibroblastes (cellules du tissu conjonctif).


"Nous avons montré que les nanoparticules peuvent endommager l'ADN et les chromosomes à travers une barrière intacte. Les nanoparticules n'ont pas traversé la barrière ; en fait, les lésions sont dues à un nouveau mécanisme", indiquent les auteurs de l'étude. Ce mécanisme mettrait en jeu les canaux présents dans les membranes et les voies de communication entre cellules.


"Cette étude expérimentale montre à la fois des effets génotoxiques indirects inconnus et de possibles moyens d'action thérapeutique inédits pour les nanoparticules", commente le professeur Gérard Lasfargues, chef du département santé au travail de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail. Il en découle la "nécessité de proposer des tests adéquats et standardisés pour prendre en compte ces données dans l'évaluation de la génotoxicité des nanoparticules", estime-t-il.


L'évaluation en cours au niveau européen de la génotoxicité des nanoparticules devra donc intégrer ce nouvel élément. De même pour la mise en oeuvre du règlement européen Reach sur les substances chimiques, qui inclut les nanoparticules. Deux procédures dans lesquelles l'Afsset est investie. La découverte d'une génotoxicité indirecte constitue en tout cas un élément nouveau au moment où se déroule en France, jusqu'au 23 février 2010, une consultation publique sur les nanotechnologies.


Paul Benkimoun

Article paru dans l'édition du 10.11.09
http://www.lemonde.fr
http://www.internationalnews.fr/article-une-etude-alerte-sur-un-nouveau-risque-toxique-induit-par-les-nanoparticules-39091664.html
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7 novembre 2009 6 07 /11 /novembre /2009 06:19
LE MONDE
06.11.09
(Internetactu.net)

Titre original: Nanotechnologies : s’informer, s’exprimer… et après ?


Source:geo

peine lancé, le débat public sur les nanotechnologies, intitulé Je m'informe, je m'exprime, censé éclairer l'Etat sur "l'organisation du contrôle et du suivi des nanomatériaux, la caractérisation de l'exposition et l'évaluation de la toxicité sur l'homme et les écosystèmes, l'information et la protection du travailleur et du consommateur, les modalités de soutien à la recherche et aux innovations dans ce domaine", fait déjà polémique.

Le collectif Pièces et Mains d'Oeuvre, connu pour ses enquêtes, analyses, ses actions d'éclat et son refus critiques des nanotechnologies, refuse ainsi de participer à ce qu'il qualifie de campagne nationale d'acceptabilité des nanotechnologies destinée à “vaincre la méfiance de citoyens- consommateurs échaudés par trop de scandales techno-industriels : amiante, vache folle, OGM” (voir aussi Aujourd'hui le nanomonde, site qu'ils consacrent à cette opération).

 

Rappelant avec ironie que pour Paul Valéry “La politique est un mécanisme qui sert à empêcher les gens de prendre part à ce qui les concerne directement“, Dorothée Benoit-Browayes, déléguée générale de l’association Vivagora et auteure de Le Meilleur des nanomondes, estime pour sa part qu’il s’agit là d’un "vaste chantier dans un paysage pourtant déjà bien construit", et d’ores et déjà financé, à concurrence de plusieurs centaines de millions d’euros, par le gouvernement français :


"Alors que les dés sont largement lancés en France comme dans le monde, un tel processus de discussions sera-t-il en mesure de faire changer d’opinion les sceptiques qui sont légions ?

De quoi sera-t-il question tout au long de ces débats ? De technique ou de politique ? On peut craindre que l’explication cache la forêt, la plupart des Français n’ayant jamais entendu parler de ces nanoobjets. Difficile de débattre sur un tsunami resté invisible. Les nanotechnologies – qui désignent les interventions sur la matière pour réarranger ses briques élémentaires ou atomes - déferlent en effet depuis dix ans sur le marché sans crier gare."


UN DÉBAT MORT-NÉ ?


Dimitri Granger, professionnel des relations publiques et blogueur sur Pr2Peer, blog consacré à “la communication corporate à l’âge de la mise en réseau des hommes et des idées” se demande quant à lui si, à peine lancé, le débat public ne serait pas mort-né :


"Si l’initiative semble louable et pleine de bonnes intentions, les objectifs paraissent un peu flous (et) on comprend assez rapidement que le débat est orienté dans un sens précis. Si l’internaute curieux souhaite s’informer et se faire un avis, le site du débat public propose une “base de connaissance” impressionnante de plusieurs centaines de pages entièrement consacrées à valoriser l’énorme potentiel des nanos et dans laquelle on trouve à peine … dix lignes sur les risques liés à ces technologies !


En réalité, et en dehors de toute considération sur le fond (risque/opportunité des nanos, principe de précaution/principe de réalité économique), il est clair que ce débat risque d’être mort-né, en tout cas sur le site officiel. Assez complexe pour freiner les ardeurs du grand public, ce "débat" sera trusté par deux blocs qui s’opposeront, souvent sans nuance, en copiant des argumentaires pré-existants."


On a ainsi vu, à Toulouse, des opposants au débat distribuer des tracts estampillés Pièces et mains d’oeuvre (tout en jurant ne pas connaître le collectif PMO), “simples citoyens” interrompant le débat et faisant évacuer la salle après y avoir jeter une bouteille d’ammoniac (voir le compte-rendu, désopilant, sur Nanostelia, et celui, en forme de dialogue de sourds, de deux opposants sur Nanomonde).


Le 15 octobre dernier, jour du lancement de la consultation, un "community manager" de la société I&E Consultants, spécialisée dans les stratégies d'opinion et chargée d’organiser le débat public, proposait aux lecteurs d’Agoravox d’y contribuer, afin de "couvrir les réunions publiques qui se dérouleront près de chez vous (et) faire connaître votre avis et vos arguments".


Quinze jours plus tard, le “média citoyen” ne répertorie qu’une seule contribution évoquant les nanotechnologies, et pas sûr qu’elle calme ou tempère le débat : il s’agit en effet d’un panorama des programmes et investissements militaires en faveur des nanotechnologies. Et l’on y apprend entre autres qu’aux Etats-Unis le ministère de la défense est le principal bénéficiaire du programme national de développement des nanotechnologies : près du quart de ses fonds étant orienté vers la recherche de défense…

 

Source: blog.bioethics.net


QUAND LE DÉBAT CRÉE... DU MANQUE


En attendant de savoir ce que cette consultation entraînera (ou pas) en terme de débats, de gouvernance, de pistes de réflexions et d’actions, il est intéressant de voir ce qui, dans un autre pays - en l’occurrence, le Royaume-Uni - s’est passé (ou pas) suite à ce type de débat public.

Le Responsible Nano Forum, qui prône "une utilisation responsable de la nanotechnologie pour le bénéfice de la société" et réunit plusieurs autres réseaux de recherche impliqués dans les enjeux sanitaires et sociaux des nanos (PEN, SafeNano, SnIRC…), a ainsi proposé à 28 experts anglo-saxons de faire le point sur les "opportunités et incertitudes liées à la nanoscience et aux nanotechnologies".


Le titre du rapport (.pdf), "5 years on - a beacon or just a landmark ? (5 ans après - un phare, ou juste une balise ?)" témoigne de ce que la plupart des questions posées à l’époque restent encore en suspens.


Les experts consultés se félicitent de la prise de conscience des questions et risques associés aux "nano"(matériaux & technologies), qui ne peut plus être contestés. A contrario, ils déplorent également, quasi unanimement, le manque de transparence des entreprises, le manque d’informations et de recherches sur les risques associés, mais aussi le manque de volonté des responsables politiques de les financer, en dépit, pourtant, d’une pléthore de consultations publiques et rapports qui, tous ou presque, relèvent précisément… ces mêmes manques.


Comme si le fait de parler des nanotechnologies se traduisait bien plus en discours, recommandations et propositions qu’en actes concrets et mesures d’(auto)régulations. Dans le même temps, plusieurs des auteurs constatent que les industriels n’ont toujours pas "tiré les leçons des OGM" : sans transparence, il est impossible d’avoir confiance !


OGM, GELÉE GRISE... LE SCÉNARIO CATASTROPHE


En 2004, la Royal Society (l’académie des sciences britannique) et la Royal Academy of Engineering (qui fédère, elle, les ingénieurs) publiaient un rapport conjoint, Nanoscience et nanotechnologies : opportunités et incertitudes, qui allait faire date.


Anthony Seaton, professeur de médecine du travail et de l’environnement à l’Université d’Aberdeen et qui en fut l’un des auteurs, rappelle la perception que s’en faisaient les gens : "à l’époque, le Prince Charles avait apposé son sceau royal sur les craintes d’une planète menacée par la gelée grise", du nom donné à ce scénario catastrophe popularisé dans le roman de science-fiction "La proie" de Michael Crichton, où l’on voyait des nanomachines autorépliquantes finir par absorber notre monde…

"Des groupes de pression environnementaux attisaient les peurs sur les risques qu’encouraient tant les humains que l’environnement. Certains signes laissaient penser que le combat pourrait sérieusement entrâver le développement des nanotechnologies, comme cela était arrivé pour les modifications génétiques; certains en appelaient à un moratorium.


Et puis le rapport a été publié, il a été bien accueilli tant par le gouvernement que par la société ; les principaux motifs d’anxiété du public et des chercheurs ont été calmés et le développement commercial a repris à un rythme soutenu."


On aurait tort, pourtant, de lire dans cette introduction une charge contre ceux qui s’inquiétaient, ou qui s’inquièteraient encore, des risques associés aux nanotechnologies : "je pense que l’effet le plus important et immédiat du rapport tenait au fait que nous reconnaissions des dangers potentiels, et que nous identifions les domaines nécessitant plus d’investigation".


Le rapport de 2004 contribua en effet à révéler les liens entre nanoparticules et pollution de l’air d’une part, d’autre part que les nanotubes de carbone avaient une configuration similaire à celle des fibres d’amiante, et qu’ils pourraient s’avérer aussi nocifs. De plus, une bonne partie de ses recommandations portaient sur les risques sanitaires, et les enjeux en terme de régulation, ce qui incita notamment l’Union Européenne à financer plusieurs programmes de recherche axés sur les risques et dangers posés par les nano.


Andrew Maynard, conseiller scientifique du Project on Emerging Nanotechnologies (PEN) et de nombreux autres organismes (dont le Responsible Nano Forum), rappelle ainsi à quel point ce rapport a pu faire autorité, parce qu’il était scientifiquement fondé, qu’il envisageait les aspects tant sociaux, économiques que politiques, et qu’il expliquait, avec “la voix de la raison“, qu’il était urgent de se pencher sur les problèmes susceptibles de se poser, notamment, en terme de santé et d’environnement.


ATTENTION : MATÉRIAUX SIMILAIRES À L'AMIANTE


Pourtant, note Maynard, depuis cinq ans, on ne compte plus les discussions, ateliers, rapports et autres consultations au sujet du développement responsable des nanotechnologies qui, pour la plupart, témoigne d’une vision semblant faire fi du rapport de 2004, “comme si le rapport avait servi de balise, et non de phare : tout le monde en a entendu parler mais personne ne prend le temps de le (re)lire.”


Maynard s’étonne ainsi de voir que les autorités britanniques décident de lancer une nouvelle consultation publique afin d’informer les citoyens sur sa stratégie, et de recueillir leurs avis, alors qu’il n’a toujours pas mis en oeuvre l’intégralité des propositions du rapport de 2004.

La conclusion du professeur Seaton est à ce titre plutôt inquiétante, lorsque l’on sait ce qui se vend, aujourd’hui, dans le commerce, et basés sur les nanotechnologies et qui, pour une bonne part, relève de compléments alimentaires, de produits cosmétiques, ou antibactériens.


Il explique en effet qu’il ne se risquera pas, en l’état, à ingérer des nanoparticules antibactériennes (qui pourraient endommager nos systèmes digestifs), pas plus qu’à utiliser d’aérosol contenant des nanoparticules (susceptibles d’endommager le coeur et les poumons), ou encore d’appliquer sur sa peau des produits cosmétiques ou crèmes solaires comportant des nanoparticules (à cause des risques d’allergies et de photosensibilisation) :


"En conclusion, j’exhorte les autorités en charge de la sécurité et de la santé à initier un audit et une analyse du cycle de vie de la fabrication et de l’utilisation des nanotubes afin de protéger ceux qui les fabriquent, et ceux qui en usent.

Si nécessaire, je mettrais un panneau d’indication : “Attention : utilisation de matériaux similaires à l’amiante".


Jean-Marc Manach

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9 octobre 2009 5 09 /10 /octobre /2009 21:40

Le 15 octobre se tiendra à Strasbourg la première réunion d’un Débat public national sur les nanotechnologies. Unifiées à l’échelle de l’atome, la chimie, la biologie, la physique, l’informatique, la robotique, etc., s’entremêlent pour ouvrir des perspectives d’innovation vertigineuses. Certaines font miroiter des espoirs de traitements miraculeux contre le cancer, quand d’autres ont de quoi faire frémir : bombes miniatures, papillons transformés en drones vivants... (Source: Le Monde Diplomatique)


LE MONDE
09.10.09
Internetactu.net

Titre original:
Nanotechnologies : ce qui se vend



A l'approche du débat public national autour du développement et de la régulation des nanotechnologies, qui se déroulera du 15 octobre au 24 février, il nous a semblé intéressant de se pencher sur les produits qui, d'ores et déjà, incorporent des nanomatériaux, ou sont fabriqués au moyen de nanotechnologies.

Equipements sportifs, peintures, emballages, textiles… la base de données du Project on Emerging Nanotechnologies (PEN), une fondation américaine qui veut œuvrer à plus de transparence en matière de nanotechnologies, a franchi cet été le cap des mille produits vendus dans le commerce, soit une augmentation de 379 % depuis sa création en 2006 (voir le bilan que nous dressions à l'époque : 212 (nano)produits de consommation).


On y trouve 155 vêtements, 137 produits cosmétiques et 33 crèmes solaires, des shampoings, dentifrices, traitements capillaires, anti-douleurs ou contre l’acné… : 60 % d’entre eux relèvent des domaines de la santé et du bien-être.


Viennent ensuite les produits de ménage et d’entretien, ou pour le jardin : peintures, nettoyants, purificateurs d’air, dégraissants, anti-odeurs, oreillers et autres produits antibactériens, sacs à main et bagages imperméabilisés…


Les produits alimentaires arrivent en troisième position, avec un complément "bionique" (et aromatisé au café), un autre pour maigrir ou vivre plus longtemps, de la vitamine en spray, du chocolat light, ou encore cette "eau maternelle", filtrée au moyen de nanoparticules d'argent "sans traitements chimiques" et tout spécialement créée pour les mamans et leurs nouveaux-nés.

On y dénombre également 68 produits et accessoires utilisés dans le secteur automobile, essentiellement des revêtements extérieurs, destinés à lutter contre les effets de l'humidité, de l'érosion, ou des marques pouvant abîmer les carrosseries.


En cinquième position, les produits électroniques sont également assez bien représentés, et constituent une bonne partie du chiffre d'affaires des "nanos", avec la mémoire de l'iPod et la batterie de l'iPhone, toutes deux fabriquées par Samsung, les processeurs Intel Core 2 Duo, la puce IBM de la Xbox 360, les écrans OLED, et même un téléphone mobile antibactérien…

Au rayon enfants, on trouve une tétine, un biberon, une brosse à dents, et même des nounours antibactériens.


Nos amis les animaux ne sont pas en reste ; ils peuvent en effet se voir offrir un lit intelligent, imperméable, antibactérien et à la pointe de la technologie puisqu'il reste "naturellement propre" et sans odeur, un shampoing désodorisant, un spray pour restaurer le pH neutre de leur peau, ou encore un collier antiaboiement qui envoie une "correction" électrique à chaque fois que votre chien aboie…


En 2007, le marché des produits incorporant des nanomatériaux était estimé à 147 milliards de dollars, et pourrait, d'après le PEN, atteindre les 3 100 milliards en 2012. Si le marché est, pour l'instant, dominé par l'industrie chimique, cette dernière pourrait d'ici là être supplantée par les industries pharmaceutiques et cosmétiques.


540 de ces produits viennent des USA, 240 de l'Asie du Sud-Est, et 154 d'Europe, dont 17 de France (deux raquettes de tennis, quinze parfums et produits cosmétiques).


Le PEN a également publié, en juin 2009, une carte des 1200 entreprises, universités et laboratoires qui, aux Etats-Unis, travaillent au développement et à la commercialisation des nanotechnologies.


Malheureusement, note le bureau européen de l'environnement (EEB, qui se présente comme "la voix environnementale des Européens", et qui fédère plus de 140 ONG dans 31 pays) dans un rapport consacré à l'impact sanitaire et environnemental des nanomatériaux, on ne dispose pas, en Europe, d'information claire sur ce qui est produit ou testé par qui, où, ni en quelle quantité.

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3 octobre 2009 6 03 /10 /octobre /2009 17:37
Univers-Nature
29 septembre 2009

par Cécile Cassier


Source:thereadingroom
Technologie capable de manipuler la matière à des échelles infinitésimales, équivalant au milliardième de mètre (1), la nanotechnologie ne cesse d’être plébiscitée comme la révolution technologique de ce siècle. Il est vrai que, grâce à ses techniques de miniaturisation, elle octroie aux nanostructures des propriétés remarquables, à l’image d’effets de superplasticité et de déformation, qui en font un allié de poids dans des domaines aussi variés que l’électronique, l’industrie pharmaceutique, la cosmétologie, l’agroalimentaire ou encore l’habillement. Toutefois, pour prometteuse que soit cette technologie révolutionnaire, elle soulève de plus en plus de questions quant à un potentiel impact sur la santé humaine.

Pour apaiser les craintes grandissantes du public face à la course contre la montre que le gouvernement entend mener en faveur du développement des nanotechnologies, la CNDP (2) a été commanditée afin d’organiser une « tournée participative » ouverte au public. Constitué de 17 réunions thématiques réparties sur l’ensemble de la France (3), ce débat public doit s’ouvrir le 15 octobre prochain à Strasbourg pour se clore le 23 février 2010 à Paris.

Toutefois, pour le collectif Pièces et Main d’œuvre (
http://www.piecesetmaindoeuvre.com
)
, composé de « citoyens grenoblois », cet espace de consultation publique n’est qu’un leurre destiné à mieux faire passer la « pilule ». Pour contrebalancer cette initiative visant à « épuiser les opposants dans de stériles échanges », le collectif a lancé un site intitulé « Aujourd’hui, le nanomonde » (4 link)
). Y sont disponibles des informations relatives à la nanotechnologie, notamment des publications et des rapports parus sur cette thématique, ainsi qu’un agenda des actions prévues.

Notes
1- En comparaison, le milliardième de mètre est 30 000 fois plus fin que l’épaisseur d’un cheveu.
2- Commission Particulière du Débat Public nanotechnologies.
3- Strasbourg - 15 octobre - Gouvernance européenne
Toulouse - 20 octobre - Cycle de vie des produits nanostructurés et protection de l'environnement
Orléans - 27 octobre - Nanotechnologies et protection des consommateurs
Bordeaux - 3 novembre - Process industriels/ Nanotechnologies et protection des travailleurs
Clermont-ferrand - 10 novembre - Nanoparticules et pollution atmosphérique
Lille - 17 novembre - Nanotechnologies et textile
Besançon - 24 novembre - Nanotechnologies et compétitivité
Grenoble - 1ER décembre - Informatique et libertés individuelles
Caen - 8 décembre - Matériaux de construction et applications multi-usages
Metz - 15 décembre - Habitat et énergie
Rennes - 5 janvier - Nanotechnologie et Sécurité alimentaire
Lyon - 12 janvier - Nanoparticules dans l'organisme. Etudes sur la toxicité
Marseille - 19 janvier - Sécurité intérieure et défense nationale
Orsay - 26 janvier - Recherche et développement industriel. Convergence nanotechnologies
Montpellier - 9 février - Protection de l'environnement.
Nantes - 16 février - Nouveaux matériaux pour les biens d'équipement
Paris - 23 février - Ethique et Gouvernance
4- Le site accessible à l’adresse suivante : www.nanomonde.org
Cf. pour plus d’informations se référer au dossier « Nanotechnologies : Un très petit monde pour de gros enjeux » disponible dans le n° 21 d’Echo Nature (septembre / octobre 2008).
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7 août 2009 5 07 /08 /août /2009 19:46

Planetenonviolence

Appréciée pour ses propriétés anti-bactériennes et anti-mauvaises odeurs, la nano particule d’argent devient une attraction célèbre dans une gamme de produits allant des soquettes aux bandages, jusqu’aux machines à laver. Mais, alors que les bienfaits de l’argent la propulsent sur le devant de la scène des nanomatériaux utilisés dans les biens de consommation, des scientifiques recommandent qu’on fasse un examen approfondi des conséquences sur la santé et l’environnement de la nano particule d’argent



« Le grand public a besoin de savoir qu’il y a des risques inconnus associés aux produits qu’ils achètent contenant des nano matériaux » ont dit les chercheurs Paul Westerhoff et Troy M. Benn dans un rapport prévu pour le 235 ème anniversaire de la American Chemical Society ( ACS – Société Américaine de Chimie)

Westerhoff et Benn rapportent qu’un lavage ordinaire peut diluer des quantités substantielles de nano particules d’argent des soquettes imprégnées de ce matériau. Les chercheurs de l’état d’Arizona ont émis l’hypothèse que les particules, prévues pour chasser les odeurs de pieds, pourraient se déplacer à l’intérieur d’un système d’évacuation d’eaux usées et pénétrer des sources naturelles d’eau où elles pourraient avoir des effets non désirés sur les organismes aquatiques vivant dans l’eau et éventuellement sur les humains aussi.

« C’est le premier rapport qui étudie la diffusion d’argent à partir de ce type de vêtement » selon les auteurs.

Derrières ces inquiétudes, une expérimentation très simple. Benn et Westerhoff ont acheté 6 paires de soquettes anti odeurs de marques connues imprégnées de nano particules d’argent. Ils les ont immergées dans une bassine contenant de l’eau distillée à température ambiante, ont secoué leur contenu pendant une heure et testé l’eau sur deux types d’argent- la forme dangereuse « ionique » et celle moins étudiée de nano particule.

« Nous avons constaté que différentes soquettes libéraient de l’argent à des taux variables, suggérant qu’il pourrait y avoir un processus de fabrication qui conserverait mieux l’argent dans les socquettes » a dit Benn. « Certains tissus de soquettes libèrent de l’argent dés les premiers lavages, d’autres le libèrent graduellement. Certains n’ont libéré aucun argent. » Les chercheurs présenteront les marques spécifiques qu’ils ont étudiées devant l’ACS.

Si une quantité suffisante de nano particules s’échappe de ces socquettes jusque dans les systèmes de traitement des eaux usées et s’infiltre dans les lacs, rivières et fleuves voisins, cela pourrait endommager les écosystèmes aquatiques, a dit Benn. La forme dissoute de l’argent ionique n’attaque pas seulement les bactéries à l’origine des mauvaises odeurs. Elle peut aussi détourner des processus chimiques essentiels pour la vie d’autres microbes et animaux aquatiques.

« Si vous commencez à libérer de l’argent ionique, c’est nuisible pour toute la biote aquatique. Une fois que les ions argent pénètrent dans les branchies du poisson, c’est un tueur particulièrement efficace » a dit Benn. L’argent ionique n’est toxique pour les humains qu’à des taux très élevés. « La toxicité des nano particules reste à déterminer » a dit Westerhoff.

Ils espèrent déclancher un examen plus large des conséquences sur la santé et l’environnement à cause de l’utilisation de nano matériaux, de même que développer la prise de conscience du rôle des nano particules dans le quotidien des consommateurs.

Historiquement, l’argent a été utilisé depuis l’époque romaine, tandis que sous sa forme de nano particule elle est seulement apparue récemment dans les produits de consommation. Mis à part dans les soquettes, on en trouve aussi dans certains bandages des vêtements de sport et des produits d’entretien. Benn pense que la plupart des consommateurs ne sont pas au courant de ces nano additifs.

« J’ai parlé avec beaucoup de personnes qui ne connaissent pas obligatoirement ce que sont les nano technologies mais ils achètent des produits contenant des nano particules. Si les consommateurs ne sont pas au courant des conséquences négatives sur l’environnement que peut avoir l’utilisation de ces nano matériaux , ils ne peuvent pas prendre une décision en connaissance de cause lorsqu’ils achètent un produit contenant des nano particules » a dit Benn.

C’est pour cela que les chercheurs suggèrent une amélioration de l’étiquetage. Westerhoff propose que les étiquettes de vêtements se présentent avec, comme au dos des paquets alimentaires, une liste complète des « ingrédients » tel que le nano argent.

Westerhoof et Benn projettent d’étendre leurs expérimentations à d’autres produits de consommation contenant des nano matériaux. Ils espèrent trouver le moment dans chaque cycle de vie du produit où peuvent être libérées les nano particules dans l’environnement, de même qu’ils espèrent développer une meilleure détection des méthodes d’authentification des nano particules dans des échantillons d’eau et d’air.

« De notre travail il ressort que les groupes de consommateurs ont besoin de commencer à réfléchir sur ces choses là »

« Devrait-il y avoir d’autres normes pour ces produits ? »

Sources

AzoNano 07/04/08

Publié sur Global Research Traduction Mireille Delamarre pour www.planetenonviolence.org

http://www.planetenonviolence.org/Frayeur-des-Scientifiques-Face-a-l-Utilisation-Banalisee-des-Nano-Technologies-et-des-Nano-Particules-dans-les-Produits_a1545.html

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Nanotechnologies
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5 juillet 2008 6 05 /07 /juillet /2008 03:20

Source: Jean Dornac dans Altermonde


Par Christian Berdot

 

Les nanotechnologies sont des techniques de modification de la matière au niveau des atomes et des molécules. Elles ont des applications dans TOUS les domaines industriels et technologiques, et touchent aussi bien la matière inerte que la matière vivante.

 

 

 


Source: www.notre-planete.info



Après leur rapport sur les nanotechnologies dans les produits cosmétiques, les Amis de la Terre / Friends of the Earthdans l’alimentation et l’agriculture. publient de nouveau un rapport, cette fois sur les produits nanotechnologiques


Avec ce nouveau rapport, nous souhaitons informer les citoyens et faire bouger les responsables politiques. Le laisser-faire actuel est inacceptable.


Vous trouverez dans cet article :


- notre communiqué de presse ;
- le résumé ;
- la liste des preuves expérimentales de la toxicité de certains nano-produits présents dans les aliments ;
- la traduction de certains chapitres du rapport.


Ensuite vous pouvez trouver le rapport complet en anglais sur le site des Amis de la Terre / Friends of the Earth Europe à l’adresse suivante : www.foeeurope.org


- Page 54, liste des nano-produits en agriculture ;
- Page 55, liste des nano-produits dans les emballages ;
- pages 56, 57, liste des nano-produits dans les équipements de cuisine ;
- page 58, listes des nano-produits dans les boissons et les additifs ;
- page 59, 60 liste des nano-produits dans les compléments alimentaires / alicaments


Le communiqué de presse


Les nanotechnologies ou la chronique d’une invasion programmée


Bruxelles – Montreuil le 11 mars 2008 - Les Amis de la Terre Europe publient aujourd’hui un rapport dans lequel on apprend que des produits nanométriques non testés et potentiellement dangereux peuvent être trouvés, partout en Europe, dans les aliments, les emballages alimentaires et d’autres produits des rayons de supermarchés.


« Nanotechnologies » est le nom donné aux techniques de manipulations de la matière au niveau de l’atome et des molécules. Elles sont utilisées pour la fabrication de compléments nutritifs, de films plastiques alimentaires, d’emballages, de récipients, d’outils de cuisine antibactériens, mais aussi pour la transformation de la viande. On en trouve également dans l’agriculture, dans des boissons chocolatées, et même dans des produits pour bébés. Malgré les craintes que soulèvent les nano-matériaux à cause de leurs risques de toxicité, les citoyens en consomment déjà, des ouvriers les manipulent sans aucune protection et les législateurs sont à la traîne d’une industrie en pleine expansion [1]. En effet, les Amis de la Terre-Europe révèlent dans leur rapport «  Du Labo, dans nos assiettes : les nanotechnologies dans l’alimentation et l’agriculture  » qu’il existe au moins 104 produits agricoles et alimentaires contenant des nanomatériaux - ou fabriqués par nanotechnologie - en vente actuellement dans l’Union européenne, plusieurs centaines de ces produits étant même en vente sur le marché mondial.


Dans l’Union européenne, comme ailleurs, les règlements et les lois sont totalement inadaptés aux propriétés particulières des nano-matériaux. Les Amis de la Terre-France s’associent à la demande de leurs collègues européens pour que les responsables politiques de l’Union européenne mettent enfin en place une législation complète et réellement basée sur le principe de précaution, pour protéger les citoyens et l’environnement. Nous demandons aussi que l’Union Européenne favorise les agricultures biologiques et paysannes, seules garantes de la protection des citoyens et de l’environnement.


Pour Helen Holder, coordinatrice de la campagne « Alimentation et Agriculture » des Amis de la Terre-Europe : « Il est choquant que les citoyens européens puissent être exposés à des produits potentiellement toxiques, présents dans les aliments ou les emballages alimentaires sans qu’aucune règlementation n’assure leur sécurité. Les responsables politiques doivent arrêter de nous dire que les règlements actuels suffisent et doivent combler de toute urgence les lacunes règlementaires. »


Pour Christian Berdot des Amis de la Terre-France : « D’un côté, on étouffe les petits producteurs avec des règlements sanitaires toujours plus tatillons et coûteux, de l’autre les industriels ont toute latitude pour mettre en danger la santé des citoyens avec des produits potentiellement toxiques sans que le moindre étiquetage, la moindre règlementation ne soient mise en place. Comme pour les OGM, on commercialise d’abord et on fera les études après, l’intérêt des industriels passe avant la protection des citoyens et de l’environnement. »


Résumé, en français, du rapport


« Du Labo, dans nos assiettes : les nanotechnologies dans l’alimentation et l’agriculture »


Rapport préparé par les Amis de la Terre-Australie, Europe et Etats-Unis avec le soutien des Amis de la Terre-Allemagne (Mars 2008)


Des produits créés à l’aide des nanotechnologies sont en train de contaminer la chaîne alimentaire et ce, en l’absence de tout étiquetage obligatoire, de tout débat public ou de la moindre règlementation. Les nano-particules fabriquées, les nano-émulsions et les nano-capsules se retrouvent dans les pesticides agricoles, les aliments confectionnés industriellement, les emballages alimentaires et les matériaux en contact avec les aliments y compris les récipients de stockage, la coutellerie et les planches à couper. Les Amis de la Terre ont repéré 106 de ces produits actuellement en vente, mais nous pensons qu’il ne s’agit que d’une petite fraction des produits déjà commercialisés.


On définit provisoirement les nanotechnologies comme le domaine relatif aux matériaux, systèmes et process qui opèrent à une échelle de 100 nanomètres (nm) ou moins. Cela inclut la manipulation de matériaux et la création de structures et systèmes à l’échelle de l’atome et des molécules, l’échelle nano. Les propriétés et les effets des particules à l’échelle nano sont très différents de celles de particules de même composition chimique mais de taille plus grande. Les nano-particules peuvent être plus réactives chimiquement et plus bioactives que de grandes particules. Du fait de leur très petite taille, elles peuvent aussi pénétrer beaucoup plus facilement dans nos corps que des particules plus grandes et dans les cellules, les tissus et nos organes. Ces nouvelles propriétés offrent de nombreuses possibilités nouvelles pour des applications dans l’industrie alimentaire comme, des additifs nutritifs puissants, des colorants et des agents de saveur plus forts ou des composants antibactériens pour les emballages alimentaires.


Le nombre d’études scientifiques qui démontrent que certains des nano-matériaux actuellement utilisés dans les aliments et les produits agricoles entraînent de nouveaux risques pour la santé et l’environnement est en forte augmentation. Il a été prouvé par exemple, que les nano-particules d’argent, de dioxyde de titane, de zinc ou d’oxyde de zinc - matériaux actuellement utilisés dans des compléments alimentaires, des emballages alimentaires et des matériaux en contact avec les aliments – sont hautement toxiques pour les cellules dans des tests in vitro. Des études environnementales récentes laissent penser aussi que ces substances peuvent être toxiques pour des espèces écologiquement importantes comme les puces d’eau. Malgré tout cela, il n’y a pour l’instant aucune réglementation particulière pour les nanotechnologies, ni aucun test exigé avant que des nano-matériaux soient utilisés dans les aliments, les emballages ou les produits agricoles.


Des études d’opinion montrent que face à l’ignorance scientifique quant aux risques que représentent les nano-matériaux dans les additifs alimentaires, les ingrédients et les emballages, les gens ne veulent pas manger de nano-aliments. Mais comme aucun règlement n’exige que les nano-produits présents dans l’alimentation ne soient étiquetés nous n’avons strictement aucun moyen pour choisir une alimentation sans nano-produit.


D’une manière plus générale, les nanotechnologies menacent aussi le développement d’une agriculture et de modes d’alimentation durables. Bien que les ventes globales de produits bio et la production de ces mêmes produits connaissent une croissance continue, les nanotechnologies risquent de renforcer la dépendance de l’agriculture à des techniques basées sur la chimie et une forte consommation d’énergie. Alors que sur fond de changements climatiques, il y va de l’intérêt général de réduire les distances entre consommateurs et producteurs, les nanotechnologies vont servir à promouvoir les transports de produits frais ou transformés sur des distances encore plus grandes. Il est à craindre que les nanotechnologies n’accentuent encore le contrôle des grandes entreprises multinationales sur l’agriculture mondiale et les systèmes alimentaires et réduisent encore le pouvoir des paysans à contrôler eux-mêmes, localement, la production alimentaire.


Les risques environnementaux et sanitaires graves et les conséquences sociales liés aux nanotechnologies dans l’agriculture amènent les Amis de la Terre / Friends of the Earth d’Australie, d’Europe, et des Etats-Unis à exiger :


Qu’un moratoire soit mis en place sur toute commercialisation de produits alimentaires, d’emballages alimentaires, de matériaux en contact avec les aliments ou d’agrotoxiques (produits phytosanitaires) contenant des nanomatériaux fabriqués, tant que des réglementations encadrant spécifiquement les nanotechnologies n’auront pas été mises en place et que les citoyens n’auront pas été activement impliqués dans les prises de décision.


Des réglementations spécifiques aux nanotechnologies doivent garantir que :


- Les nanomatériaux sont réglementés en tant que nouvelles substances


- Tout nanomatériau fabriqué à dessein doit être l’objet de nouvelles études de risque en tant que substance nouvelle, même si les propriétés de ses homologues à grandes particules sont connues.


- Tout nanomatériau fabriqué à dessein doit être l’objet d’études spécifiquement conçues pour les nanotechnologies et visant à évaluer les conséquences sur la santé et l’environnement ; avant toute autorisation de commercialisation pour des usages dans l’alimentation, l’emballage alimentaire, les produits en contacts avec les aliments ou les applications agricoles, il doit être démontré aussi que ce matériau ne pose aucun problème.


La définition basée sur la taille est revue à la hausse


- Toutes les particules mesurant jusqu’à 300 nm doivent être considérées comme des « nanomatériaux » dans les études de risques pour la santé et l’environnement, étant donné qu’il est prouvé qu’elles posent des problèmes sanitaires semblables à ceux que posent des particules de moins de 100 nm, définies comme nano-particules.


Transparence dans les études de risque et étiquetage des produits


- Toutes les données importantes en lien avec les études de risques et les méthodes utilisées sont du domaine public.


- Tout nano-ingrédient fabriqué est indiqué clairement sur l’étiquette du produit pour permettre à tout citoyen d’être informé lors de son choix.


Nous demandons aussi que :


- Les citoyens sont impliqués dans les prises de décision

- Les citoyens, y compris tout groupe, partie prenante concernée, doit être impliqué dans tous les aspects de la prise de décision concernant les nanotechnologies dans l’alimentation et l’agriculture. Cela inclut le développement de cadres réglementaires, de règles d’étiquetage et la priorité donnée à ce que des fonds publics financent la recherche en alimentation et agriculture. Le droit des citoyens à refuser les nano-aliments doit être explicitement reconnu.

- L’agriculture et l’alimentation bio et paysannes sont soutenues

- La demande de la société pour une agriculture et une alimentation durables doit être un élément important dans l’évaluation des nanotechnologies dans l’agriculture et l’alimentation, et dans le processus de décision.


Pour tout renseignement Amis de la Terre-France - france@amisdelaterre.org
Tél : 01 48 51 32 22


11 mars 2008

Suite: http://www.altermonde-sans-frontiere.com/spip.php?article6120#forum1762   

Articles sur les nanotechnologies sur internationalnews:

Nanotechnologies
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12 mars 2008 3 12 /03 /mars /2008 07:05
HORIZONS ET DEBATS
11 mars 2008
par Yvonne Rappo1
Envie de «nano»?

LAB-imrcp-gmicel.jpgPhoto: edchimie.ups-tlse.fr

La nanotechnologie est une technique duale classique. Ses applications militaires et civiles ne sont guère distinctes. Dans le domaine alimentaire, elle rend possible des choses qui font penser au monde de la science-fiction. Ainsi, on pourra sans doute dans un proche avenir, en appuyant sur un bouton, transformer une «nanopizza multisaveurs» en margherita, prosciutto e funghi ou quattro stagioni selon que le four à micro-ondes sera réglé sur 400, 800 ou 1600 watt. Les nanocapsules qui contiennent les saveurs et les colorants sont libérées à des températures différentes, si bien que les pizzas auront des couleurs et des goûts différents.


Qu’est-ce que la nanotechnologie?

 Une partie de la nanotechnologie s’intéresse aux nanoparticules. Le diamètre de ces particules est inférieur à 100 nanomètres (1 nano­mètre = 1 milliardième de mètre). Les particules de cet ordre de grandeur ont des propriétés chimiques et physiques différentes de celles des particules plus grosses de même composition chimique. Voici quelques exemples de propriétés physiques différentes: apparition de magnétisme, de conductibilité électrique, modifications de couleur (p. ex. les nanoparticules d’or sont rouges). Plus les particules d’une matière sont petites, plus grand est le rapport entre la surface et le volume. Cette surface gigantesque entraîne une plus grande réactivité. La création de ces nanoparticules donne aux matières des propriétés toutes nouvelles qu’on ne rencontre pas dans la nature et dont les effets sur les hommes, les animaux et l’environnement sont encore problématiques.

Ainsi une étude de l’université de Rochester sur des souris a montré que l’exposition à des grosses particules de téflon provoquait certes chez ces animaux des réactions morbides mais qu’ils s’en remettaient assez bien après un certain temps. Mais exposées pendant 15 minutes seulement à des nanoparticules de téflon de 20 nanomètres, toutes les souris mouraient au bout de 4 heures. La toxicité des nanoparticules réside probablement dans leur petite taille.2

On peut comparer à différents égards la nanotechnologie au génie génétique: ils interviennent tous les deux dans des processus vitaux. On présente la nanotechnologie comme la technologie-clé du XXIe siècle et on prétend qu’elle révolutionnera notre alimentation. L’idée d’une alimentation réduite à des pilules d’astronautes qui nous faisait sourire dans notre jeunesse menace de devenir réalité.

 
Frites au ketchup au dioxyde de silicium ou mousse au chocolat au dioxyde de titane?


Il existe déjà des aliments et des emballages de la nanogénération bien qu’il n’y ait jamais eu de débat sur la question. On enferme déjà des colorants, des arômes et des vitamines naturels dans des nanocapsules que l’on mélange à des boissons. On ajoute artificiellement des nanoparticules à des aliments: ainsi certaines variétés de ketchup contiennent du dioxyde de silicium, ce qui les rend plus épaísses. On ajoute aux vinaigrettes du dioxyde de titane comme agent blanchissant et les silicates d’aluminium sont censés empêcher l’agglutination des aliments en poudre.3


Les nanoparticules peuvent notamment influencer la consistance, la couleur, le goût ou l’apparence des aliments ou prolonger leur durée de conservation. Ainsi le blanchiment gras à la surface du chocolat pose un problème. Les fabricants de confiseries doivent souvent stocker leurs produits assez longtemps. Or le chocolat (bonbons, tablettes, etc.) est très sensible aux variations de température, si bien que les fabricants sont contraints de veiller à des conditions de stockage bien précises pour pouvoir offrir aux consommateurs un chocolat d’excellente qualité. Comme tout est plus cher dans l’économie néolibérale, on dépose sur la surface du chocolat des particules de dioxyde de titane qui ne sont visibles qu’au microscope. On évite ainsi l’apparition du blanchiment gras. Le groupe alimentaire américain Mars a fait breveter son invention nanotechnologique en 2003. Jusqu’ici, on connaissait l’utilisation des nanoparticules de dioxyde de titane dans les crèmes solaires. Que les aliments, par exemple le chocolat, doivent garder une éternelle jeunesse est un fait nouveau.4

Proche avenir
 

La date de péremption des aliments pourra bientôt être facilement reconnue même sans lunettes grâce à d’inquiétants changements de couleurs. Grâce à un «nanoindicateur», l’emballage deviendra subitement rouge si le lait est tourné, la viande de poulet deviendra bleue si la date de consommation est dépassée ou si l’emballage n’est plus imperméable.

 
Des risques inconnus?
 

Lorsque des fabricants introduisent de manière ciblée des nanoparticules dans des aliments, des produits de beauté ou des médicaments, ces particules entrent en contact avec la peau ou le système digestif. Dans l’état actuel de la recherche, les risques sont considérables. Les nanoparticules exogènes peuvent pénétrer dans des couches de tissus inaccessibles aux plus grosses particules. Combien de temps y restent-elles et quels sont leurs effets? On ne connaît pas non plus l’effet des nanoparticules sur le cerveau. Comme elles sont minuscules, elles peuvent passer la barrière hémato-encéphalique qui n’est en principe pas facile à franchir. On sait encore peu de choses sur les effets des substances étrangères non solubles. On a des raisons de penser qu’elles peuvent provoquer des modifications inflammatoires.

Il existe également quelques études scientifiques animales sur ces effets. Il y a deux ans, des essais ont fait grand bruit: on a constaté que des nanoparticules de carbone appelées «buckyballs» (euphémisme pour Buckminsterfullarènes) endommageaient le cerveau de certains poissons. Des dommages aux poumons ont également été observés dans des études animales. De petits tubes de carbone, les nanotubes, peuvent, après avoir été inhalés, rester dans les poumons et s’y agglutiner. Des expériences sur des rats ont montré que ces agrégats était suffisamment gros pour boucher les bronches. On connaît depuis longtemps des effets semblables provoqués par l’amiante. Certes, les nanotubes sont 1000 fois plus petits que les fibres d’amiante, mais dans des expériences de l’EMPA (institut suisse de recherches en sciences des matériaux et en technologie), ils s’agglutinaient pour former de grosses aiguilles et ressemblaient par leur aspect et leur toxicité aux fibres d’amiante. Ils se sont révélés particulièrement dommageables pour les cellules. Aussi les nanotubes s’avèrent-ils extrêmement problématiques d’un point de vue toxicologique. 5

 
Pas de quoi fouetter un chat?  Qu’en pensent les assurances?
 

Connaissant les risques, comme pour l’énergie nucléaire ou le génie génétique, les assurances craignent des dommages imprévisibles de grande ampleur qu’elles ne sont pas prêtes à couvrir sans restrictions. Contrairement aux déclarations euphoriques de l’économie, la compagnie de réassurance Swiss Re évalue sans doute les risques de manière réaliste. En 2004 a paru son rapport sceptique très remarqué intitulé Nanotechnology: small matter, many unknowns (Zurich, 2004). L’un des plus gros réassureurs du monde y parvient à la conclusion que les nanotubes pourraient avoir les mêmes effets que l’amiante sur la santé humaine. Il recommande aux assurances de limiter la responsabilité en matière de risques dus à la nanotechnologie. Cette recommandation, qui rappelle celle faite en matière d’énergie nucléaire et de génie génétique, laisse fortement penser qu’il y a là pas mal de choses qui clochent.

 
Enormes profits en perspective!
 

Malgré ces mises en garde contre une technologie dangereuse, les grands groupes investissent des sommes énormes, et justement dans l’alimentaire. Des pronostics audacieux prévoient pour les nanoaliments un marché de 20 milliards de dollars d’ici à 2010 (alors qu’il n’était «que» de 2,6 milliards en 2003 et de plus de 7 milliards en 2006).

Le marché de l’ensemble de la nanotechnologie, qui concerne quelque 4000 firmes et instituts de recherches, devrait être de 1,13 billion d’euros.

Dans le monde entier, plus de ­200 sociétés s’occupent actuellement du développement de nanoaliments, avant tout aux USA, au Japon et en Chine et de plus en plus également en Europe. Les pionniers du secteur sont Heinz, Nestlé, Hershey Food, Unilever et Keystone. Des firmes chimiques comme Henkel, Degussa et Bayer se sont proposées comme partenaires. Kraft a été le premier groupe industriel à mettre sur pied un laboratoire. Maintenant, le consortium Nanotek, créé également par Kraft et auquel participent 15 universités et instituts de recherches américains, s’occupent du développement de procédés nanotechnologiques pour le secteur alimentaire. (cf. Die Joghurtlüge, p. 169)

«D’ici à 2015 au plus tard, la nanotechnologie aura transformé profondément la fabrication d’aliments, de confiseries, de boissons, etc. On estime que le processus concernera 40% ou plus de la production. L’agriculture, premier fournisseur de matières premières, qui est très étroitement liée à l’industrie alimentaire, n’est pas épargnée par cette tendance. Syngenta, BASF, Bayer Cropscience et Monsanto ont depuis longtemps jeté leur dévolu sur cette technologie prometteuse. Certains tiennent l’influence de la nanotechnologie pour plus importante que la mécanisation ou la révolution verte avec ses substances agrochimiques et ses variétés à haut rendement.» (cf. Die Joghurtlüge, p. 170)

Les parallèles entre le génie génétique et la nanotechnologie sautent aux yeux. Leurs applications sont nombreuses, leurs risques prouvés. Ce qui manque encore, ce sont des recherches systématiques et il faut les exiger. Dans le domaine des nanoaliments, il n’existe même pas de directives de déclaration et de régulation. Aucun emballage ne doit signaler que l’aliment a subi une transformation nanotechnologique. On ne trouvera nulle part de termes comme «nanotechnologiquement modifié», «produit nano», etc.

On nous «vend» la nanotechnologie et le génie génétique comme des technologies-clés du XXIe siècle. Ces deux domaines ont en commun qu’ils suscitent un grand intérêt scientifique et commercial qui s’étend jusqu’au domaine militaire.

 
Et les consommateurs?
 

On ne cesse d’approvisionner les supermarchés en nanoproduits (aliments, produits d’entretien, cosmétiques, etc.) et malgré d’importantes réticences, le secteur se mure dans le silence. Pour ne pas entraver le développement du marché, on a jusqu’ici évité d’aborder publiquement le sujet ou on l’a présenté surtout positivement. On attend encore un large débat. Dans le domaine alimentaire tout particulièrement, les consommateurs réagissent de manière très sensible. Le refus catégorique des aliments génétiquement modifiés en est un exemple.

Les départements de relations publiques des grands groupes veulent empêcher les réactions négatives des consommateurs grâce à une meilleure communication et un meilleur marketing qui se focalisent sur les avantages de la nanotechnologie. On veut absolument éviter que la population ne refuse cette technologie comme elle le fait pour les OGM.

Mais cette stratégie ne réussit pas partout. Des scientifiques mettent en garde contre ces substances. Le groupe canadien ETC6 a demandé, en 2003, un moratoire sur les nanoproduits en raison des risques imprévisibles qui sont à craindre. Le 6 avril 2006, l’organisation a réaffirmé sa demande de moratoire aussi bien pour les nanoproduits que pour les recherches de laboratoire. Dans son rapport intitulé «Down on the Farm», elle a mis en garde contre le fait que l’éventuelle toxicité de nombreux nanoingrédients n’ait pas été étudiée. Le dioxyde de titane sous forme de micrograins est autorisé depuis les années 1960 en tant que colorant alimentaire. Or des études toxicologiques ont montré que les nanoparticules de dioxyde de titane peuvent provoquer des inflammations des tissus. «C’est ce qui rend l’utilisation des nanoparticules dans l’alimentation si inquiétante.»7

Greenpeace a également publié en 2003 une étude critique sur la nanotechnologie. Selon cette organisation, ce n’est que lorsqu’on sera fixé sur les risques actuellement difficiles à évaluer et que les craintes auront été écartées que les nanoproduits pourront être commercialisés.8

Comme pour le moment la présence de nanoparticules dans les produits n’est pas signalée, on ne peut pas savoir lesquels en contiennent. Peut-être sont-ils plus nombreux sur le marché qu’on ne le pense. Est-ce que nous le voulons?

Soit dit en passant: la nanotechnologie doit avant tout être développée de toute urgence pour permettre la construction de bombes nucléaires de quatrième génération. Historiquement, la nanotechnologie est une enfant des laboratoires d’armes nucléaires.9    •

1    L’auteure est spécialiste du commerce de détail et enseigne la connaissance des produits alimentaires
2    Günter Oberdörster, Toxicology of ultrafine particles: in vivo studies, Royal Society of London, 10/2000
3    Andrea Borowski, Süddeutsche Zeitung, 2/11/06
4    cf. Marita Vollborn, Vlad D. Georgescu, Die Joghurtlüge, (p. 169), Campus Verlag, 2006, ISBN 3-593-37958-9
5    TA Swiss, Informationsbroschüre Nano !Nanu ?, www.ta-swiss.ch
6    ETC = Experimental Technology Council
7    www.etcgroup.org/en/issues/nanotechnology.html
8    www.greenpeace.org.uk/f/MultimediaFiles/FullReport/5886.pdf
9    André Gsponer, From the Lab to the Battlefield? Nanotechnology and Fourth-Generation Nuclear Weapons, 2005


http://www.horizons-et-debats.ch/index.php?id=779

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2 mars 2008 7 02 /03 /mars /2008 14:43
Arthur Bruzzone/Comcast
14 mn 17 s - 23 nov. 2006
www.SFunscripted.com

Dr. Goldstein caused much stirring with his article in Salon.com on nanotechnology. A professor and practioner, he outlines his view of the potentials and dangers of the new technology. Including the possibility of 'animated robots', hybrid life forms created by man, but with possible self-direction. Brilliant and articulate, Dr. Goldstein rattles our views nanotechnology. 

Part I
Part II


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